Pour commencer

Entre Noël 2007 et le nouvel an 2008, j’ai eu une discussion un peu poussée sur la religion et la spiritualité, avec ma sœur ainée et mon beau-frère, tous les deux catholiques très pratiquants. Ma sœur était dans une période de doute suite au décès d’un membre de la famille de mon beau-frère, mort jeune d’une leucémie. Je lui ai donné mon point de vue sur la vie et la mort, et pour étayer ce dernier, je leur ai raconté une expérience hors du commun que j’avais vécue des années auparavant. Comme je terminais mon récit en expliquant comment cela avait représenté un pas énorme dans l’évolution de ma spiritualité, ma sœur s’est levée, est allée chercher une revue catholique parue quelques semaines plus tôt et m’a lu un article du courrier des lecteurs, dans lequel une femme relatait l’expérience qu’elle avait vécue peu de temps auparavant, avec pratiquement les mêmes mots que je venais d’utiliser pour décrire mon propre ressenti. J’en suis resté c.., car je ne m’étais alors jamais vraiment posé la question de savoir si d’autres personnes avaient pu vivre la même chose que moi. C’était comme si pendant toutes ces années cette expérience avait accaparé mon esprit au point que cette idée ne m’ait jamais effleuré.

Du coup, l’idée de trouver un moyen de communiquer sur cette expérience et de pouvoir me mettre en relation avec des personnes intéressées, a commencé à germer dans un coin de mon cerveau. C’est donc à cette époque que j’ai écrit mes premières lignes que j’ai d’abord placées sur un blog comme cela était à la mode à cette époque. Cette première ébauche est restée quelques mois en ligne et n’a probablement été lue par personne avant que le site d’hébergement ne soit fermé, mon fournisseur d’accès à internet ayant été racheté par un plus gros que lui.

Il m’a fallu encore plusieurs années pour me décider à renouveler l’expérience, mais cette fois avec une vision différente du but à atteindre.

L’expérience

Ce que j’avais relaté de façon succincte à ma sœur et à mon beau-frère concernait une expérience que j’avais vécue en octobre 1992, et qui peut être résumée de la manière suivante :

Une prise de conscience de l’Être, absolu, infini,
intimement lié au « Tout ».

Oui, je sais, dit comme cela, ça semble ostentatoire, mais en fait, essayer de résumer ce que je vais exposer par la suite, semble vain, les mots ayant ici une limitation extrêmement frustrante.

La notion du « Tout » est elle-même difficile à faire comprendre à quiconque n’a pas vécu ce genre d’expérience. De mon point de vue, c’est le mot qui se rapproche le plus et qui explique le mieux ce concept. Je sais que seuls ceux qui ont vécu une prise de conscience similaire comprendront parfaitement ce que cela signifie en lisant ces lignes.

Je vais tenter de restituer dans les lignes qui vont suivre, mon vécu face à cette expérience, c’est-à-dire l’avant, le pendant, l’après avec ses multiples aspects, afin d’essayer d’apporter un peu d’éclaircissements sur cette notion de prise de conscience du « Tout ».

La religion

Pour commencer et pour me situer, quelques mots sur mon éducation religieuse. J’ai baigné dans la religion catholique toute mon enfance. J’ai fait la totale, catéchisme, communions, jusqu’à la confirmation. Jusque-là tout allait bien. C’est vers 15 ans que j’ai commencé à me remettre en question par rapport à la religion. Bon, à la base ça ne collait déjà pas entre la théorie de l’évolution et la genèse de la Bible. Mais, on peut comprendre que ce soit une parabole, une vue de l’esprit. Par contre, je trouve choquant que l’on ait fait avaler l’histoire du paradis, de la pomme et du péché originel à des générations, à tel point que j’ai vu une fois ma mère avoir une discussion plus que houleuse sur le sujet avec ma sœur ainée qui était en passe de devenir institutrice (et donc dépositaire d’un savoir plus cartésien) ! Cela m’a fait prendre conscience combien la religion pouvait être « dangereuse » pour la liberté de penser par soi-même !

À côté de cela, j’avais surtout remarqué qu’il y avait beaucoup trop de contradictions entre le message et les actes des « pratiquants ». Ce qui a commencé vraiment à me déranger, c’était l’hypocrisie des gens dans leurs actes de tous les jours par rapport aux discours qu’ils venaient écouter à la messe. Il y avait là quelque chose qui me dépassait. Et en plus, on pouvait passer un coup d’éponge sur tout ça en allant de temps en temps se confesser afin de recevoir le pardon de « Dieu le Père », qui plus est, via un intermédiaire… Et puis d’abord, comment un Dieu se disant être le Dieu d’amour pouvait-il être aussi un Dieu punisseur, etc., etc. Bon, il y en aurait beaucoup à dire, mais là n’est pas le débat …

Je ne rejette quand même pas la religion en bloc, car elle peut véhiculer des notions et des valeurs très importantes, et apporter un réel soutien dans la vie de bien des gens. D’ailleurs, je pense que le fait d’avoir eu des parents pratiquants n’est pas un hasard (en fait, je ne crois pas au hasard), et même, je les remercie de m’avoir permis d’acquérir ces valeurs tout au long de mon enfance, car elles ont énormément participé par la suite à mon développement spirituel et à faire de moi ce que je suis.

La spiritualité

J’ai donc vécu une bonne partie de mon enfance dans cette culture religieuse, mais je pense que dès le départ, je n’étais pas fait pour cette forme de spiritualité où l’on doit prendre pour argent comptant ce que les autres vous racontent. Même si je suis né dans une famille très religieuse, il me semble que « tout petit déjà » j’avais une conscience qui allait au-delà de ces questions religieuses. On pourrait même parler d’une certaine forme d’éveil, prenant à l’époque l’apparence d’une curiosité démesurée pour tout ce qui m’entourait. D’ailleurs, au début des années 70, mes parents achetaient chaque semaine le fascicule de l’encyclopédie « Tout l’Univers » (un nom prédestiné), et je le dévorais littéralement comme ma dose de savoir hebdomadaire. J’étais, entre autres, fasciné par les mystères de la cosmologie et c’est par le biais de cet intérêt que j’ai vécu ce que je considère comme ma première expérience psycho-spirituelle.

Je devais avoir un peu plus d’une dizaine d’années et par une nuit étoilée, je regardais le ciel et me mis à essayer d’appréhender, d’imaginer, l’infini de l’univers. Et j’ai ressenti ce jour-là une sensation ineffable, comme un mélange de vertige, d’immensité pour ne pas dire d’infini, de joie incommensurable, le tout mêlé à la surprise et, à une sorte de frustration et de peur viscérale. Cela n’a duré que quelques secondes, mais a été tellement troublant et marquant que je ne l’ai pas oublié bien des années après.

Donc, après avoir rejeté la religion catholique, poussé par ma curiosité et ma soif de comprendre, je me suis intéressé aux autres formes de religions et de spiritualités. Car même si je n’étais plus en accord avec la démarche de l’église, je n’ai à aucun moment rejeté l’idée d’une forme de « Conscience Supérieure ». Je n’ai plus voulu l’appeler « Dieu », car ce que j’en avais appris à travers la religion, ne cadrait pas avec l’intuition que j’en avais, et le mot lui-même me paraissait trop limité et trop entaché du conditionnement reçu tout au long de mon enfance pour pouvoir exprimer un tel concept. J’entrais donc dans une démarche de recherche spirituelle. Cela ne s’est pas fait du jour au lendemain, cette quête s’est étalée sur plusieurs années avec des étapes plus ou moins marquées, liées souvent à une recrudescence de lecture sur le sujet, entrecoupée de grandes périodes d’inactivité, pour ne pas dire d’oubli …

Je me souviens que le tout premier livre que j’ai lu était un condensé du premier livre du Dr Moody « La vie après la vie ». J’y trouvais des concepts qui cadraient merveilleusement bien avec l’idée que je me faisais d’une « Conscience Supérieure ». Par la suite, je me suis attaqué au petit rayon de livres plus ou moins ésotérique de la bibliothèque de mon lycée, ce que j’avais d’ailleurs trouvé un peu surprenant pour une bibliothèque d’un établissement religieux, qui plus est, gérer par un frère. Bien plus tard, j’ai dévoré le rayon autrement plus achalandé de la bibliothèque du comité d’entreprise de la société où je travaillais. Je continuais bien sûr à m’intéresser aussi à beaucoup de choses comme les sciences et la technique, ainsi qu’à un domaine très vaste, celui de l’homme et de son fonctionnement. Et du coup, cet intérêt pour l’être humain, m’a forcément amené à faire un travail sur moi-même, à travers la réflexion, l’observation, l’attention, avec des supports comme la sophrologie, la méditation et quelques stages de contrôle mental. Attention, je ne suis pas un forcené de ce genre de choses, je ne suis même pas très assidu, ce sont des choses que j’ai expérimenté plus par curiosité sur le sujet que par intérêt ou par sacerdoce. D’ailleurs suite à l’expérience de la religion, je suis devenu, par principe, un peu réfractaire à toute forme de dogme ou de règles.

C’est en fait dans le contexte d’une de ces périodes de recherche un peu plus frénétique à travers les livres qu’est survenue cette expérience de l’illumination. Il n’y a pas vraiment eu de signe avant-coureur, excepté peut-être quelque temps avant, une petite prise de conscience de la séparation d’avec la « Source» (c’est plutôt sous ce concept que je l’ai perçue cette fois-là, plutôt que comme le « Tout »). Lors d’une séance de méditation, j’avais eu la vision un peu particulière représentant la « Source» sous la forme d’un cercle central et d’individus « séparés » (sous la forme de dessins au trait d’un bonhomme) gravitant « tête en bas » autour de ce cercle, et où l’un des individus entra en contact avec le cercle par le sommet de sa tête pour ne plus faire qu’un avec ce dernier. Cette vision m’avait fortement imprégné du sentiment que nous avions « oublié » quelle était notre véritable origine et que l’un des buts de notre vie était d’essayer de se souvenir de qui nous « étions » réellement.

Avertissement

Concernant la limitation des mots …

Je vais utiliser certain mot comme Dieu, divin, mais j’ai un peu de mal car je ne peux m’empêcher en les utilisant, de penser à la représentation religieuse qui y est assujettie. Ceci est dû au rejet que j’ai eu de la religion par rapport à ce que j’ai perçu comme un conditionnement reçu pendant des années, la religion s’évertuant à nous faire avaler des concepts formatés et relativement limitants, et donc à la peur que ce que j’essaie d’exprimer au travers de ces mots ne soit déformé par cette influence religieuse et de ce fait mal interprété.

Donc pour être clair quand je parle de Dieu c’est pour nommer le « Tout », la « Source » et quand je parle du divin, je parle de la capacité de toutes choses à exprimer un statut divin, c’est-à-dire de ne faire qu’un avec le « Tout ».

J’ai lu dernièrement que ce genre d’expérience était nommé d’une manière générale expérience « psycho-spirituelle », et plus particulièrement dans le cas d’une prise de conscience du « Tout », on parle de « sentiment océanique ». Personnellement, je préfère conserver le mot « Illumination » que je considère comme étant bien plus représentatif de mon vécu.

Il m’a aussi manqué bien des mots pour pouvoir essayer d’expliquer ce que l’on peut ressentir dans ce genre d’expérience. J’ai parfois tourné et retourné mes phrases sans avoir le sentiment de trouver la consonance juste pour exprimer ce que j’avais en tête, frustré par le manque de vocabulaire et avec la crainte de passer à côté de l’essentiel.

Il en va de même pour la structure de ce document que j’ai remaniée plus d’une fois. Elle me paraît toujours aussi décousue, car il est très difficile de retranscrire d’une manière ordonnée et linéaire quelque chose d’aussi multidimensionnel que l’expérience que j’ai vécue ainsi que l’information perçue pendant celle-ci.